María auxiliátrix


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QOHELÉT

QOHÉLET

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Ecclesiástes - Summárium

INTRODUCTION

CHAPITRE PREMIER  

Tout ce qui est ici-bas n’est que vanité. Rien de nouveau sous le soleil. La sagesse même et la science sont des sources de peines et d’afflictions.

CHAPITRE II  

Vanité des plaisirs, des richesses, des bâtiments. Avantages de la sagesse. Vanité d’amasser des richesses pour un héritier inconnu.

CHAPITRE III  

Toutes choses ont leur temps. Tout est dans une vicissitude continuelle. Inquiétude partout. L’homme et les bêtes meurent également.

CHAPITRE IV  

Violence et jalousie des hommes. Oisiveté des insensés. Folie des avares. Avantage de la société. Vanité de la souveraine puissance. Obéissance préférable aux sacrifices.

CHAPITRE V  

Être circonspect dans ses paroles. S’acquitter de ses vœux. Ne point se scandaliser du renversement de la justice. L’avare est insatiable. Riche malheureux au milieu de ses richesses.

CHAPITRE VI  

Malheureuse condition de l’avare. Il a du bien, et il n’ose pas en jouir.

CHAPITRE VII  

Vaine curiosité. Bonne réputation. Utilité des corrections. Avantage de la sagesse. Point de juste qui ne pèche. Négliger les discours des hommes. La femme dangereuse.

CHAPITRE VIII  

Ne point s’éloigner des commandements de Dieu. Patience de Dieu. Affliction des justes. Prospérité des méchants.

CHAPITRE IX  

Nul ne sait s’il est digne d’amour ou de haine. Égale condition des bons et des méchants en ce monde. Faire le bien tandis qu’on le peut. Sagesse du pauvre méprisée.

CHAPITRE X  

Suites funestes de l’imprudence. Imprudents et esclaves élevés en dignité. Caractère du médisant. Roi enfant. Prince débauché. Ne point médire du roi.

CHAPITRE XI  

Faire l’aumône. Œuvres de Dieu inconnues. Avoir sans cesse devant les yeux le jugement de Dieu. Vanité de la jeunesse.

CHAPITRE XII  

Ne pas attendre la vieillesse pour servir le Seigneur. Énigme de la vieillesse. Vanité des choses du monde. Craindre Dieu et observer ses commandements.

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INTRODUCTION AU LIVRE DE L’ECCLÉSIASTE

L’Ecclésiaste occupe le second rang dans nos Bibles parmi les livres sapientiaux Le titre qu’il porte est tiré du nom qu’y prend l’auteur, Kohéleth, traduit en grec par Ecclêsiastês. La version latine a conservé le nom grec ; il signifie “celui qui parle à l’assemblée.” Il faut donc rejeter le sens de collectionneur qu’on a voulu donner aussi au mot Kohéleth : l’Ecclésiaste n’est pas un recueil, une collection de sentences comme les Proverbes, mais forme un tout suivi.

Le nom hébreu de Kohéleth est un titre de dignité, appliqué à la personne qui en est revêtue. Il est employé ici symboliquement (comme Is. XXIX, 1-2 ; Jer. XXV, 26) pour exprimer la fonction que remplit Salomon dans ce livre en instruisant l’assemblée. Il en est qui pensent cependant que Salomon a pu réunir le peuple, à la fin de sa vie, comme il l’avait fait lors de la Dédicace du temple, III Reg. VIII, 55-61, et lui adresser le discours contenu dans ce livre.

Le nom de Salomon ne se lit pas en toutes lettres dans ce livre ; mais celui qui prend le nom symbolique d’Ecclésiaste se dit fils de David et déclare qu’il est roi de Jérusalem, ce qui ne peut convenir qu’à Salomon. Tous les commentateurs juifs et chrétiens ont été unanimes à attribuer à ce prince la composition de l’Ecclésiaste, jusqu’au XVIIe siècle, où Grotius, le premier, en 1644, a prétendu qu’il n’était pas de lui. Aucune raison concluante n’oblige d’abandonner la croyance traditionnelle, et de refuser à Salomon la composition de l’Ecclésiaste. L’origine salomonienne de ce livre n’est pas de foi, mais elle a en sa faveur le seul argument véritablement décisif en pareille matière : l’autorité du témoignage, 1° du titre du livre, I, 1 ; 2° de toute la tradition juive et chrétienne qui est unanime, comme tout le monde le reconnait. Les objections qu’on a faites contre la croyance traditionnelle sont loin d’être irréfutables.

On croit généralement, avec la tradition juive, que Salomon composa l’Ecclésiaste dans sa vieillesse, comme il avait écrit le Cantique des cantiques dans sa jeunesse et les Proverbes dans l’âge mûr. Cette tradition est confirmée par plusieurs passages du livre qui constatent que l’auteur avait fait l’expérience personnelle des choses dont il parle. D’après le Talmud, le texte de l’Ecclésiaste fut définitivement fixé du temps d’Ézéchias par les savants dont parlent les Proverbes, XXV, 1.

La canonicité et par conséquent l’inspiration de l’Ecclésiaste est de foi. Théodore de Mopsuéstia, qui en contestait l’inspiration, fut condamné à ce sujet par le Ve concile œcuménique. Les Juifs l’avaient placé dans leur canon. On parle de discussions qui auraient eu lieu à ce sujet dans la synagogue, entre l’école de Hillel et l’école de Schammai. Celle-ci, qui avait des tendances hétérodoxes, l’attaquait surtout à cause de son obscurité. Le synode de Jabné (Jamnia) se prononça en 90 contre l’école de Schammai. Mais il était déjà à cette époque dans le canon reçu par les Juifs. On le lit encore officiellement tous les ans dans les synagogues israélites. Il a toujours fait partie du canon de toutes les Églises chrétiennes.

Quand à la forme littéraire de l’Ecclésiaste, elle est poétique, au moins en partie, et on le range généralement parmi les poèmes didactiques. Cependant la plupart des passages sont écrits en prose, et l’on n’y remarque point la symétrie du parallélisme hébreu. Dans quelques endroits, la forme poétique est très sensible. Le parallélisme est très bien réussi, V, 5 ; VIII, 8 ; IX, 11. Nous lisons, VII, 7, 9 ; IX, 8, des maximes qui ressemblent, pour la forme comme pour le fond, à celles des Proverbes. Quand Salomon parle de son expérience personnelle et communique à l’assemblée à laquelle il s’adresse ses propres réflexions, il s’exprime en prose, mais en une prose oratoire, jusqu’à un certain point mesurée et cadencée ; quand il fait des exhortations, son style devient tout à fait poétique et conforme à toutes les lois de la poésie hébraïque, surtout à la fin du livre, dans le ch. XII.

Il y a, d’ailleurs, de l’art dans l’Ecclésiaste, malgré quelques négligences et un peu de diffusion. Les répétitions et pléonasmes, VIII, 14 ; IX, 9, sont certainement voulus et cherchés, et ils produisent leur effet. “L’Ecclésiaste se manifeste comme un maitre de la parole quand, I, 4-11, et XII, 2-7, il représente, là, l’éternel va-et-vient du cours des choses, et quand il peint, ici, la vie humaine qui touche à son terme et enfin se brise” (F. Delitzsch.)

L’absence d’uniformité dans la forme et dans la marche de la pensée, l’absence même d’un enchainement rigoureux dans les idées, ne sert qu’à mieux faire ressortir la vérité qu’il veut faire pénétrer dans l’esprit de l’homme : le néant de la vie en dehors de Dieu. Il a tout essayé, rien n’a pu le satisfaire ; il passe d’un sujet à un autre, parce que rien n’est capable de le fixer et de le retenir. Son style est en parfait accord avec sa manière de voir les choses. Il tient ferme à la crainte de Dieu et au jugement final, mais il n’en sent pas moins douloureusement le dégout de la vie et ses déceptions amères, et il exprime ses sentiments d’une manière si saisissante qu’il nous les fait partager.

Avec quelle force éclate sa douleur dans la première partie de son livre : Vanitas vanitatum, dixit Ecclesiastes, vanitas vanitatum et omnia vanitas ! On ne saurait imaginer une entrée en matière plus brusque ni plus énergique. Salomon a longtemps contenu au fond de son cœur le chagrin qui le ronge, mais enfin il éclate soudainement, il répète sa pensée, et ses pléonasmes mêmes sont éloquents. C’est un coup de tonnerre qui retentit, et que l’écho répercute sourdement et longuement comme pour le rendre plus terrible. Jamais écrivain n’a trouvé une formule plus concise et plus forte pour exprimer sa pensée. Qui a pu jamais oublier le vanitas vanitatum, après l’avoir une fois entendu ?

L’Ecclésiaste est d’ailleurs un discours qui n’a pas toute la rigueur et toute la suite d’une dissertation ; mais il est impossible d’y méconnaitre un ordre et un plan. Il se compose d’un prologue, I, 2-11, de quatre sections ou parties, I, 12-XII, 7, et d’un épilogue, XII, 8-14.

La suite des pensées n’est pas toujours rigoureuse, la liaison des idées surtout n’est pas partout apparente, et l’enchainement n’est pas très méthodique ; il y a des oscillations dans l’exposition, quelques répétitions et quelques parenthèses, mais néanmoins l’idée dominante de chacune des parties se dégage clairement : 1° la vanité des plaisirs de ce monde dans la première section, I, 12-II ; 2° l’impuissance de l’homme contre la volonté de la Providence dans la seconde, III-V ; 3° la vanité des richesses et de la réputation dans la troisième, VI-VIII, 15 ; 4° le résumé de tout ce qui précède dans la quatrième, VIII, 16-XII, 7, et enfin la conclusion que le but de la vie doit être, non de chercher un bonheur parfait, qu’il est impossible d’atteindre, mais de s’assurer une sentence favorable au tribunal de Dieu.

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L’ECCLÉSIASTE

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CHAPITRE PREMIER

Tout ce qui est ici-bas n’est que vanité. Rien de nouveau sous le soleil. La sagesse même et la science sont des sources de peines et d’afflictions.

Liber Ecclesiástes qui ab hebrǽis Coheléth appellátur

Livre de l’Ecclésiaste qui est appelé Coheleth par les hébreux.

1 Verba Ecclesiástæ, fílii David, regis Jerúsalem.

1. Paroles de l’Ecclésiaste, fils de David, roi de Jérusalem.

2 Vánitas vanitátum, dixit Ecclesiástes ;

2. Vanité des vanités, a dit l’Ecclésiaste :

vánitas vanitátum, et ómnia vánitas.

vanité des vanités, et tout est vanité.

3 Quid habet ámplius homo

3. Quel avantage a l’homme de tout son travail

de univérso labóre suo quo labórat sub sole ?

auquel il travaille sous le soleil ?

4 Generátio prǽterit, et generátio ádvenit ;

4. Une génération passe, et une génération vient ;

terra autem in ætérnum stat.

mais la terre pour toujours reste debout.

5 Oritur sol et óccidit,

5. Le soleil se lève et se couche,

et ad locum suum revértitur ;

et il revient à son lieu :

ibíque renáscens,

et là renaissant,

6 gyrat per merídiem, et fléctitur ad aquilónem.

6. Il tourne vers le midi, et se dirige vers l’aquilon.

Lustrans univérsa in circúitu pergit spíritus,

Parcourant toutes choses en tournant, le vent avance

et in círculos suos revértitur.

et revient vers ses circuits.

7 Omnia flúmina intrant in mare,

7. Tous les fleuves entrent dans la mer,

et mare non redúndat ;

et la mer ne déborde pas :

ad locum unde éxeunt flúmina

vers le lieu d’où ils sortent,

revertúntur ut íterum fluant.

les fleuves retournent pour de nouveau couler.

8 Cunctæ res diffíciles ;

8. Toutes choses sont difficiles ;

non potest eas homo explicáre sermóne.

l’homme ne peut les expliquer par le discours.

Non saturátur óculus visu,

L’œil ne se rassasie pas de voir,

nec auris audítu implétur.

ni l’oreille d’entendre.

9 Quid est quod fuit ? Ipsum quod futúrum est.

9. Qu’est-ce qui a été ? Cela même qui doit être à l’avenir.

Quid est quod factum est ? Ipsum quod faciéndum est.

Qu’est-ce qui a été fait ? cela même qui doit être fait à l’avenir.

10 Nihil sub sole novum,

10. Rien sous le soleil de nouveau,

nec valet quisquam dícere : Ecce hoc recens est :

et nul ne peut dire : Vois, ceci est récent ;

jam enim præcéssit in sǽculis quæ fúerunt ante nos.

car il a déjà existé dans les siècles qui ont été avant nous.

11 Non est priórum memória ;

11. Il n’est pas mémoire des choses antérieures ;

sed nec eórum quidem quæ póstea futúra sunt

et quant à celles qui dans la suite doivent arriver,

erit recordátio apud eos qui futúri sunt in novíssimo.

il n’en sera pas souvenir chez ceux qui viendront en dernier lieu.

12 Ego Ecclesiástes fui rex Israël in Jerúsalem ;

12. Moi l’Ecclésiaste, j’ai été roi d’Israël dans Jérusalem,

13 et propósui in ánimo meo quǽrere et investigáre sapiénter

13. Et j’ai mis en mon esprit de chercher et d’examiner sagement

de ómnibus quæ fiunt sub sole.

tout ce qui se passe sous le soleil.

Hanc occupatiónem péssimam

Cette occupation très pénible,

dedit Deus fíliis hóminum, ut occuparéntur in ea.

Dieu l’a donnée aux fils des hommes, afin qu’ils s’y livrassent.

14 Vidi cuncta quæ fiunt sub sole,

14. J’ai vu toutes les choses qui se font sous le soleil,

et ecce univérsa vánitas et afflíctio spíritus.

et voilà qu’elles sont toutes vanité et affliction d’esprit.

15 Pervérsi diffícile corrigúntur,

15. Les pervers difficilement se corrigent,

et stultórum infinítus est númerus.

et des insensés infini est le nombre.

16 Locútus sum in corde meo, dicens :

16. J’ai parlé en mon cœur, disant :

Ecce magnus efféctus sum, et præcéssi omnes sapiéntia

Voilà que j’ai été fait grand, et que j’ai surpassé en sagesse

qui fúerunt ante me in Jerúsalem ;

tous ceux qui ont été avant moi dans Jérusalem :

et mens mea contempláta est multa sapiénter, et dídici.

et mon esprit a contemplé beaucoup de choses sagement, et j’ai beaucoup appris.

17 Dedíque cor meum ut scirem prudéntiam atque doctrínam,

17. Et j’ai appliqué mon cœur pour connaitre la sagesse et la doctrine,

errorésque et stultítiam ;

et les erreurs et la folie,

et agnóvi quod in his quoque esset labor et afflíctio spíritus :

et j’ai reconnu qu’en cela aussi était un travail et une affliction d’esprit ;

18 eo quod in multa sapiéntia multa sit indignátio ;

18. Parce que dans une grande sagesse est une grande indignation,

et qui addit sciéntiam, addit et labórem.

et celui qui augmente sa science augmente aussi sa peine.

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CHAP. I.

 

1.* Le prologue, I, 2-11, expose le sujet du livre. Il commence par une sentence qui le résume tout entier : Vanité des vanités et tout est vanité, I, 2. Cette sentence est répétée au commencement de l’épilogue. Une sentence termine aussi le prologue : Il n’est pas mémoire des choses antérieures, I, 11, de même que l’épilogue : Quant à toutes les choses qui se font, Dieu les appellera en jugement, XII, 14 ; mais elle est fort différente dans les deux cas, parce que la conclusion nous fait connaitre la sanction divine de la vie, tandis que le prologue ne nous fait connaitre que la vanité de la vie considérée en elle-même, indépendamment de Dieu. Tout en elle est changement et oubli. C’est cette peinture des misères de la vie qui donne au livre de l’Ecclésiaste un charme douloureux auquel personne ne peut se soustraire.

4. Pour toujours (in ætérnum) ne signifie pas éternellement. L’auteur veut dire simplement que tout dans ce monde parait, passe et disparait, tandis que la terre est stable, et, par sa stabilité, plus à l’abri que les autres êtres de perpétuelles révolutions. Ainsi il est évident que l’auteur n’enseigne pas l’éternité du monde, comme l’ont prétendu des incrédules.

8. Il n’y a pas de scepticisme dans ce verset ; nous y apprenons seulement que l’homme ne peut prétendre à approfondir et à expliquer entièrement les choses de ce monde, à cause des bornes trop étroites de son esprit.

12. * Avec ce verset commence la 1re section, I, 12-II. Elle montre quelle est la vanité de la vie, en traçant le tableau de la vanité de la sagesse humaine, I, 12-18, et celui de la jouissance des plaisirs et des biens terrestres, II, 1-11, alors même qu’on cherche à n’en jouir qu’avec modération, II, 12-26. Ainsi la sagesse, la science et le plaisir, qui paraissent les plus grands biens de l’homme sur la terre, ne sont que vanité. Cette 1re section a généralement la forme d’une confession de Salomon ; il raconte les expériences qu’il a faites pour trouver le bonheur sans tenir compte de Dieu.

13. Les fils de l’homme ou des hommes, se met souvent dans la Bible pour les hommes mêmes, les humains.

17. La doctrine ; c’est-à-dire la science, les connaissances.

18. Dans une grande sagesse, etc. Plus quelqu’un acquiert de sagesse, dit saint Jérôme en expliquant ce passage, et plus il s’indigne de se voir exposé aux vices et éloigné des vertus qu’elle demande.

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CHAPITRE II

Vanité des plaisirs, des richesses, des bâtiments. Avantages de la sagesse. Vanité d’amasser des richesses pour un héritier inconnu.

1 Dixi ego in corde meo : Vadam,

1. J’ai dit, moi en mon cœur : J’irai

et áffluam delíciis, et fruar bonis ;

et je nagerai dans les délices, et je jouirai des biens.

et vidi quod hoc quoque esset vánitas.

Et j’ai vu que cela aussi était vanité.

2 Risum reputávi errórem,

2. Le rire, je l’ai regardé comme une erreur ;

et gáudio dixi : Quid frustra decíperis ?

et à la joie, j’ai dit : Pourquoi te séduis-tu inutilement ?

3 Cogitávi in corde meo abstráhere a vino carnem meam,

3. J’ai pensé dans mon cœur à détourner ma chair du vin,

ut ánimam meam transférrem ad sapiéntiam,

afin de porter mon esprit à la sagesse,

devitarémque stultítiam,

et d’éviter la folie,

donec vidérem quid esset útile fíliis hóminum,

jusqu’à ce que je visse ce qui est utile aux fils des hommes,

quo facto opus est sub sole número diérum vitæ suæ.

et ce qu’ils doivent faire sous le soleil pendant le nombre des jours de leur vie.

4 Magnificávi ópera mea,

4. J’ai fait des choses magnifiques :

ædificávi mihi domos,

je me suis bâti des maisons,

et plantávi víneas ;

et j’ai planté des vignes ;

5 feci hortos et pomária,

5. J’ai fait des jardins et des vergers,

et consévi ea cuncti géneris arbóribus ;

et j’y ai réuni des arbres de toute espèce ;

6 et exstrúxi mihi piscínas aquárum,

6. Je me suis construit des réservoirs d’eaux

ut irrigárem silvam lignórum germinántium.

pour arroser la forêt des arbres qui étaient en pleine végétation ;

7 Possédi servos et ancíllas,

7. J’ai possédé des serviteurs et des servantes

multámque famíliam hábui :

et une nombreuse famille, ainsi que du gros bétail

arménta quoque, et magnos óvium greges,

et de grands troupeaux de brebis,

ultra omnes qui fúerunt ante me in Jerúsalem ;

au delà de tous ceux qui ont été avant moi à Jérusalem ;

8 coacervávi mihi argéntum et aurum,

8. J’ai entassé pour moi l’argent et l’or,

et substántias regum ac provinciárum ;

les richesses des rois et des provinces ;

feci mihi cantóres et cantatríces,

j’ai eu des chanteurs et des chanteuses

et delícias filiórum hóminum,

et tout ce qui fait les délices des fils des hommes,

scyphos, et úrceos in ministério ad vina fundénda ;

des coupes et des vases de service pour verser les vins ;

9 et supergréssus sum ópibus

9. Et j’ai surpassé en richesses

omnes qui ante me fúerunt in Jerúsalem :

tous ceux qui ont été avant moi dans Jérusalem ;

sapiéntia quoque perseverávit mecum.

la sagesse aussi a persévéré avec moi.

10 Et ómnia quæ desideravérunt óculi mei

10. Et tout ce qu’ont désiré mes yeux,

non negávi eis,

je ne le leur ai pas refusé ;

nec prohíbui cor meum quin omni voluptáte fruerétur,

et je n’ai pas défendu à mon cœur de gouter toutes sortes de voluptés,

et oblectáret se in his quæ præparáveram ;

et de trouver son plaisir dans ce que j’avais préparé ;

et hanc ratus sum partem meam si úterer labóre meo.

et j’ai cru que ma part était de jouir de mon travail.

11 Cumque me convertíssem ad univérsa ópera quæ fécerant manus meæ,

11. Et lorsque je me suis tourné vers les divers ouvrages qu’avaient faits mes mains,

et ad labóres in quibus frustra sudáveram,

et vers les travaux dans lesquels inutilement j’avais sué,

vidi in ómnibus vanitátem et afflictiónem ánimi,

j’ai vu dans toutes ces choses vanité et affliction d’esprit,

et nihil permanére sub sole.

et que rien n’est stable sous le soleil.

12 Transívi ad contemplándam sapiéntiam,

12. J’ai passé à contempler la sagesse,

errorésque, et stultítiam.

les erreurs et la folie,

(Quid est, inquam, homo,

(qu’est-ce que l’homme, ai-je dit,

ut sequi possit regem, factórem suum ?)

pour pouvoir suivre le roi son créateur ?)

13 Et vidi quod tantum præcéderet sapiéntia stultítiam,

13. Et j’ai vu que la sagesse surpasse autant la folie,

quantum differt lux a ténebris.

que la lumière diffère des ténèbres.

14 Sapiéntis óculi in cápite ejus ;

14. Les yeux du sage sont à sa tête,

stultus in ténebris ámbulat :

l’insensé marche dans les ténèbres ;

et dídici quod unus utriúsque esset intéritus.

et j’ai appris que le trépas est pour l’un et pour l’autre.

15 Et dixi in corde meo :

15. Et j’ai dit dans mon cœur :

Si unus et stulti et meus occásus erit,

Si la mort est pour l’insensé et pour moi,

quid mihi prodest quod majórem sapiéntiæ dedi óperam ?

que me sert d’avoir donné un plus grand soin à la sagesse ?

Locutúsque cum mente mea,

Et ayant ainsi parlé avec mon esprit,

animadvérti quod hoc quoque esset vánitas.

je me suis aperçu que cela aussi est vanité.

16 Non enim erit memória sapiéntis simíliter ut stulti in perpétuum,

16. Car la mémoire du sage, aussi bien que celle de l’insensé, ne sera pas pour toujours ;

et futúra témpora oblivióne cuncta páriter opérient :

et les temps futurs couvriront pareillement de l’oubli toutes choses :

móritur doctus simíliter ut indóctus.

le savant meurt de même que l’ignorant.

17 Et idcírco tǽduit me vitæ meæ,

17. Et c’est pour cela que je me suis ennuyé de ma vie,

vidéntem mala univérsa esse sub sole,

voyant tous les maux qui sont sous le soleil,

et cuncta vanitátem et afflictiónem spíritus.

et que toutes choses sont vanité et affliction d’esprit.

18 Rursus detestátus sum omnem indústriam meam,

18. De nouveau, j’ai détesté mon application

qua sub sole studiosíssime laborávi,

avec laquelle sous le soleil j’ai travaillé très ardemment,

habitúrus hærédem post me,

devant avoir un héritier après moi.

19 quem ignóro utrum sápiens an stultus futúrus sit,

19. J’ignore s’il doit être sage ou insensé :

et dominábitur in labóribus meis,

et il sera maitre de mes travaux,

quibus desudávi et sollícitus fui :

fruit de mes sueurs et de ma sollicitude,

et est quidquam tam vanum ?

et y a-t-il rien d’aussi vain ?

20 Unde cessávi,

20. De là j’ai cessé,

renuntiavítque cor meum ultra laboráre sub sole.

et mon cœur a renoncé à travailler davantage sous le soleil.

21 Nam cum álius labóret in sapiéntia,

21. Car, lorsque quelqu’un travaille avec sagesse,

et doctrína, et sollicitúdine,

science et sollicitude,

hómini otióso quæsíta dimíttit ;

il laisse ses recherches à un homme oisif ;

et hoc ergo vánitas et magnum malum.

et cela donc est vanité et un grand mal.

22 Quid enim próderit hómini de univérso labóre suo,

22. Car quel profit reviendra-t-il à l’homme de tout son travail

et afflictióne spíritus,

et de l’affliction d’esprit

qua sub sole cruciátus est ?

avec laquelle il s’est tourmenté sous le soleil ?

23 Cuncti dies ejus dolóribus et ærúmnis pleni sunt,

23. Tous ses jours sont pleins de douleurs et de chagrins,

nec per noctem mente requiéscit.

et même, pendant la nuit, il ne se repose pas en son âme ;

Et hoc nonne vánitas est ?

et cela, n’est-ce pas vanité ?

24 Nonne mélius est comédere et bíbere,

24. Est-ce qu’il ne vaut pas mieux manger et boire,

et osténdere ánimæ suæ bona de labóribus suis ?

et faire du bien à son âme, des fruits de ses travaux ?

et hoc de manu Dei est.

et cela vient de la main de Dieu.

25 Quis ita devorábit et delíciis áffluet ut ego ?

25. Qui se rassasiera, et nagera dans les délices autant que moi ?

26 Hómini bono in conspéctu suo

26. À l’homme bon en sa présence,

dedit Deus sapiéntiam, et sciéntiam, et lætítiam ;

Dieu a donné la sagesse, et la science et la joie :

peccatóri autem dedit afflictiónem et curam supérfluam,

mais au pécheur il a donné l’affliction, et les soins superflus,

ut addat, et cóngreget,

afin qu’il ajoute à ses biens, qu’il amasse,

et tradat ei qui plácuit Deo ;

et livre à celui qui a plu à Dieu ;

sed et hoc vánitas est, et cassa sollicitúdo mentis.

mais même cela est vanité et une inutile sollicitude d’esprit.

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CHAP. II. 14. Prov. XVII, 24 ; Infra. VIII, 1.

 

3. Ma chair ; hébraïsme, pour mon corps ; c’est-à-dire moi, ma personne ; c’est la partie pour le tout, figure très usitée dans le style biblique.

5. * Le Jardin fermé. D’après la tradition, le Jardin fermé se trouvait au sud de Bethléhem, au fond d’une vallée étroite et profonde appelée Ouadi Ourtas. « La chaleur concentrée et l’abondance des eaux rendent ce terrain si prodigieusement fertile qu’on peut y avoir cinq récoltes de pommes de terre par an. » (Liévin.)

6. * Des réservoirs d’eaux. Une tradition, dont il est d’ailleurs impossible de vérifier l’exactitude, attribue à l’auteur de l’Ecclésiaste les trois grands réservoirs situés au-dessous du Jardin fermé et qu’on appelle Étangs ou Vasques de Salomon.

7. Des serviteurs et des servantes ; c’est-à-dire des esclaves hommes et femmes. — Une nombreuse famille ; dans l’hébreu, des fils de maison ; ce qui signifie les fils des esclaves, nés dans la maison du maitre.

24. Est-ce qu’il, etc. Le but de l’auteur dans ce verset est de nous prémunir contre une avarice sordide et la passion de rechercher les richesses, en disant qu’il vaut mieux passer sa vie à jouir avec modération des fruits de ses travaux, comme d’autant de dons du Créateur, que de s’en priver pour se consumer dans des soucis immodérés et dans une vaine poursuite des faux biens de ce monde. Ainsi rien ne prouve que cet auteur se montre épicurien, comme le veulent quelques incrédules.

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CHAPITRE III

Toutes choses ont leur temps. Tout est dans une vicissitude continuelle. Inquiétude partout. L’homme et les bêtes meurent également.

1 Omnia tempus habent,

1. Toutes choses ont leur temps,

et suis spátiis tránseunt univérsa sub cælo.

et dans leurs limites elles passent toutes sous le ciel.

2 Tempus nascéndi, et tempus moriéndi ;

2. Il y a un temps pour naitre et un temps pour mourir ;

tempus plantándi, et tempus evelléndi quod plantátum est.

Un temps pour planter, et un temps pour arracher ce qui a été planté ;

3 Tempus occidéndi, et tempus sanándi ;

3. Un temps pour tuer, et un temps pour guérir ;

tempus destruéndi, et tempus ædificándi.

Un temps pour abattre, et un temps pour bâtir ;

4 Tempus flendi, et tempus ridéndi ;

4. Un temps pour pleurer, et un temps pour rire ;

tempus plangéndi, et tempus saltándi.

Un temps pour gémir, et un temps pour sauter de joie ;

5 Tempus spargéndi lápides, et tempus colligéndi,

5. Un temps pour disperser les pierres, et un temps pour les rassembler ;

tempus amplexándi, et tempus longe fíeri ab ampléxibus.

Un temps pour embrasser, et un temps pour s’éloigner des embrassements ;

6 Tempus acquiréndi, et tempus perdéndi ;

6. Un temps pour acquérir ; et un temps pour perdre ;

tempus custodiéndi, et tempus abjiciéndi.

Un temps pour garder, et un temps pour rejeter ;

7 Tempus scindéndi, et tempus consuéndi ;

7. Un temps pour déchirer, et un temps pour coudre ;

tempus tacéndi, et tempus loquéndi.

Un temps pour se taire, et un temps pour parler ;

8 Tempus dilectiónis, et tempus ódii ;

8. Un temps d’amour, et un temps de haine ;

tempus belli, et tempus pacis.

Un temps de guerre, et un temps de paix ;

9 Quid habet ámplius homo de labóre suo ?

9. Quel avantage a l’homme de son travail ?

10 Vidi afflictiónem quam dedit Deus fíliis hóminum,

10. J’ai vu l’affliction qu’a donnée Dieu aux fils des hommes,

ut distendántur in ea.

pour qu’ils en soient tourmentés.

11 Cuncta fecit bona in témpore suo,

11. Il a fait toutes choses bonnes en leur temps,

et mundum trádidit disputatióni eórum,

et il a livré le monde à leurs disputes ;

ut non invéniat homo opus

en sorte que l’homme ne découvre pas l’œuvre

quod operátus est Deus ab inítio usque ad finem.

que Dieu a opérée depuis le commencement jusqu’à la fin.

12 Et cognóvi quod non esset mélius nisi lætári,

12. Et j’ai reconnu qu’il n’y avait rien de mieux que de se réjouir

et fácere bene in vita sua ;

et de faire le bien pendant sa vie.

13 omnis enim homo qui cómedit et bibit,

13. Car tout homme qui mange, boit

et videt bonum de labóre suo,

et voit le bien de son travail,

hoc donum Dei est.

c’est un don de Dieu.

14 Dídici quod ómnia ópera quæ fecit Deus persevérent in perpétuum ;

14. J’ai appris que les œuvres que Dieu a faites persévèrent à perpétuité ;

non póssumus eis quidquam áddere, nec auférre,

nous ne pouvons rien ajouter ni rien retrancher

quæ fecit Deus ut timeátur.

aux choses que Dieu a faites afin qu’il soit craint.

15 Quod factum est, ipsum pérmanet ;

15. Ce qui a été fait demeure ;

quæ futúra sunt jam fúerunt,

les choses qui doivent être ont déjà été ;

et Deus instáurat quod ábiit.

et Dieu rétablit ce qui est passé.

16 Vidi sub sole in loco judícii impietátem,

16. J’ai vu sous le soleil, dans le lieu du jugement, l’impiété ;

et in loco justítiæ iniquitátem :

et, dans le lieu de la justice, l’iniquité.

17 et dixi in corde meo :

17. Et j’ai dit dans mon cœur :

Justum et ímpium judicábit Deus,

Dieu jugera le juste et l’impie,

et tempus omnis rei tunc erit.

et ce sera alors le temps de toute chose.

18 Dixi in corde meo de fíliis hóminum,

18. J’ai dit en mon cœur touchant les fils des hommes :

ut probáret eos Deus,

Que Dieu les éprouve,

et osténderet símiles esse béstiis.

et montre qu’ils sont semblables à des bêtes.

19 Idcírco unus intéritus est hóminis et jumentórum,

19. C’est pour cela que le trépas est pour l’homme et pour les bêtes,

et æqua utriúsque condítio.

et qu’égale est leur condition :

Sicut móritur homo,

comme l’homme meurt,

sic et illa moriúntur.

ainsi elles meurent ;

Simíliter spirant ómnia,

de la même manière elles respirent toutes,

et nihil habet homo juménto ámplius :

et l’homme n’a rien de plus que la bête :

cuncta subjacent vanitáti,

toutes choses sont soumises à la vanité :

20 et ómnia pergunt ad unum locum.

20. Toutes choses vont vers un seul lieu :

De terra facta sunt,

elles ont été faites de la terre,

et in terram páriter revertúntur.

et elles retournent pareillement à la terre.

21 Quis novit si spíritus filiórum Adam ascéndat sursum,

21. Qui sait si l’esprit des fils d’Adam monte en haut,

et si spíritus jumentórum descéndat deórsum ?

et si l’esprit des bêtes descend en bas ?

22 Et deprehéndi nihil esse mélius

22. Et j’ai trouvé que rien n’est meilleur pour l’homme

quam lætári hóminem in ópere suo,

que de se réjouir en son œuvre,

et hanc esse partem illíus.

et que c’est là sa part :

Quis enim eum addúcet ut post se futúra cognóscat ?

car qui l’amènera à connaitre les choses qui doivent arriver après lui ?

~

CHAP. III.

 

1. * Avec ce chapitre commence la 2e section, III-V. Elle établit que l’homme n’est pas le maitre de son sort, mais qu’il est tout entier entre les mains de Dieu et sous la dépendance de sa Providence. Tous les évènements de la vie sont fixés et réglés. L’homme doit donc s’y soumettre et tâcher de tirer le meilleur parti possible de la vie présente. Quels que soient les maux et les injustices qui règnent sur la terre, si l’homme a la crainte de Dieu, s’il remplit ses devoirs, s’il se confie en la Providence, s’il estime à leur juste valeur les biens de ce monde, s’il se contente de jouir des biens qui lui sont donnés, il aura agi sagement. Cette 2e section nous montre donc l’impuissance des efforts humains pour atteindre le bonheur, parce que nous ne pouvons pas lutter contre les évènements et contre la Providence. La conclusion est qu’il faut se résigner à supporter les maux qu’on ne peut éviter et à jouir des biens que Dieu nous donne.

12. Rien de mieux que de se réjouir ; que d’être joyeux, mais d’une joie sage et modérée, opposée aux soucis immodérés dont il est question dans la note sur II, 24.

13. Voit le bien ; hébraïsme, pour éprouver le bien, jouir du bien. C’est encore faussement que quelques incrédules prétendent trouver la morale d’Épicure dans ce verset, dont le sens tout naturel est que celui-là agit sagement qui, après avoir amassé quelques biens par son travail, en jouit modérément, comme d’autant de présents du ciel. Or, il n’y a rien là qui ressemble le moins du monde à l’épicuréisme. Compar. II, 24.

18-20. C’est à tort que les incrédules ont prétendu trouver du matérialisme dans ces passages. L’auteur ne veut parler que du corps, qui est matériel, et de la décomposition que la mort fait subir aux parties qui le composent, puisqu’au chap. XII, vers. 7, il déclare formellement que l’âme survit au corps.

21. Qui sait, etc. Il n’y a pas plus de matérialisme dans ce verset que dans les précédents. Salomon y dit seulement, ce qui est incontestable, que la raison humaine ne saurait voir clairement, par ses seules forces, quel peut être le sort réservé à l’homme après sa mort.

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Qo 4

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CHAPITRE IV

Violence et jalousie des hommes. Oisiveté des insensés. Folie des avares. Avantage de la société. Vanité de la souveraine puissance. Obéissance préférable aux sacrifices.

1 Verti me ad ália, et vidi calúmnias

1. Je me suis tourné vers d’autres choses,

quæ sub sole gerúntur,

et j’ai vu les oppressions qui se font sous le soleil,

et lácrimas innocéntium,

et les larmes des innocents

et néminem consolatórem,

que personne ne console :

nec posse resístere eórum violéntiæ,

j’ai vu qu’ils ne peuvent résister à la violence des oppresseurs,

cunctórum auxílio destitútos,

étant destitués du secours de tous.

2 et laudávi magis mórtuos quam vivéntes ;

2. Et j’ai loué les morts plus que les vivants ;

3 et feliciórem utróque judicávi

3. Et j’ai jugé plus heureux que les uns et les autres,

qui necdum natus est,

celui qui n’est pas encore né,

nec vidit mala quæ sub sole fiunt.

et qui n’a pas vu les maux qui se font sous le soleil.

4 Rursum contemplátus sum omnes labóres hóminum,

4. De nouveau j’ai contemplé tous les travaux des hommes ;

et indústrias animadvérti patére invídiæ próximi ;

et j’ai vu que l’industrie est exposée à l’envie du prochain :

et in hoc ergo vánitas et cura supérflua est.

et en cela donc est vanité et soin superflu.

5 Stultus cómplicat manus suas,

5. L’insensé met ses mains l’une dans l’autre,

et cómedit carnes suas, dicens :

et mange ses chairs, disant :

6 Mélior est pugíllus cum réquie,

6. Mieux vaut une poignée avec le repos,

quam plena utráque manus cum labóre et afflictióne ánimi.

que les deux mains pleines avec le travail et l’affliction d’esprit.

7 Consíderans, réperi et áliam vanitátem sub sole.

7. Considérant, j’ai trouvé encore une autre vanité sous le soleil :

8 Unus est, et secúndum non habet, non fílium, non fratrem,

8. Tel est seul et n’a pas un second, ni fils, ni frère,

et tamen laboráre non cessat,

et cependant il ne cesse de travailler,

nec satiántur óculi ejus divítiis ;

et ses yeux ne se rassasient pas de richesses ;

nec recógitat, dicens :

et il ne réfléchit pas, et il ne dit pas :

Cui labóro,

Pour qui est-ce que je travaille ?

et fraudo ánimam meam bonis ?

pour qui est-ce que je prive mon âme des biens ?

In hoc quoque vánitas est et afflíctio péssima.

En cela aussi est vanité, et une affliction très malheureuse.

9 Mélius est ergo duos esse simul quam unum ;

9. Mieux vaut donc être deux ensemble, que d’être seul ;

habent enim emoluméntum societátis suæ.

car ils ont l’avantage de leur société ;

10 Si unus cecíderit, ab áltero fulciétur.

10. Si l’un tombe, il sera soutenu par l’autre.

Væ soli, quia cum cecíderit, non habet sublevántem se.

Malheur à celui qui est seul ! Parce que, lorsqu’il tombe, il n’a pas qui le relève.

11 Et si dormíerint duo, fovebúntur mútuo ;

11. Et s’ils dorment deux, ils s’échaufferont mutuellement :

unus quómodo calefíet ?

un seul, comment s’échauffera-t-il ?

12 Et si quíspiam prævalúerit contra unum,

12. Et si quelqu’un prévaut contre un seul,

duo resístunt ei ;

deux lui résistent :

funículus triplex diffícile rúmpitur.

un cordon triple est difficilement rompu.

13 Mélior est puer pauper et sápiens,

13. Vaut mieux un enfant pauvre et sage,

rege sene et stulto,

qu’un roi vieux et insensé

qui nescit prævidére in pósterum.

qui ne sait pas prévoir pour l’avenir.

14 Quod de cárcere catenísque intérdum quis egrediátur ad regnum ;

14. Parce que quelquefois, tel sort de la prison et des chaines pour régner :

et álius, natus in regno, inópia consumátur.

tel autre, né dans la royauté, se consume dans une extrême pauvreté.

15 Vidi cunctos vivéntes qui ámbulant sub sole

15. J’ai vu tous les vivants qui marchent sous le soleil

cum adolescénte secúndo, qui consúrget pro eo.

avec le second jeune homme qui se lèvera à sa place.

16 Infinítus númerus est pópuli

16. Il est infini, le nombre du peuple

ómnium qui fúerunt ante eum,

de tous ceux qui ont été avant lui ;

et qui póstea futúri sunt non lætabúntur in eo ;

et ceux qui doivent venir après ne se réjouiront pas en lui ;

sed et hoc vánitas et afflíctio spíritus.

mais cela aussi est vanité et affliction d’esprit.

17 Custódi pedem tuum ingrédiens domum Dei,

17. Garde ton pied en entrant dans la maison de Dieu,

et appropínqua ut áudias.

et approche afin d’écouter.

Multo enim mélior est obediéntia quam stultórum víctimæ,

Car l’obéissance vaut beaucoup mieux que les victimes des insensés

qui nésciunt quid fáciunt mali.

qui ne savent pas ce qu’ils font de mal.

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CHAP. IV. 17. I Reg. XV, 22 ; Os. VI, 6.

 

1. Les oppressions ; littér. les calomnies. Voy. Prov. XIV, 31. — Des oppresseurs ; littér. d’eux (eorum), c’est-à-dire de ceux qui sont les auteurs des oppressions et des larmes dont il vient d’être fait mention.

2. Et j’ai loué,etc. ; c’est-à-dire j’ai trouvé l’état des morts préférable à celui des vivants. Saint Jérôme remarque que le sage ne considère dans cette expression que la souffrance dans l’état des vivants, et que le repos dans celui des morts. C’est ainsi que plusieurs saints personnages ont trouvé, dans certaines circonstances, la mort préférable à la vie. Voy. III Reg. XIX, 4 ; Tob. III, 1 ; I Mach. III, 50.

15. Le second ; l’héritier d’un roi, lequel doit régner en sa place, a souvent beaucoup plus de partisans que le roi régnant lui-même ; tout le peuple porte sur lui ses espérances. — Pro eo. Le pronom eo tient lieu de primo ou rege, sous-entendu, et que suppose évidemment l’adjectif secundo. Plusieurs pensent que l’auteur fait ici allusion au roi vieux et insensé, et à l’enfant pauvre et sage du vers. 13.

16. Du peuple ; c’est-à-dire de la multitude.

17. Garde, etc. Considère où tu mets le pied, quand tu entres dans le temple ; c’est-à-dire songe à la conduite que tu dois y tenir ; et approche-toi de ceux qui annoncent sa parole, pour écouter et pratiquer les vérités qu’ils t’enseigneront. Cette docilité te rendra agréable au Seigneur. — Car l’obéissance, etc. Voy. I Reg. XV, 22 ; Os. VI, 6.

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Qo 5

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CHAPITRE V

Être circonspect dans ses paroles. S’acquitter de ses vœux. Ne point se scandaliser du renversement de la justice. L’avare est insatiable. Riche malheureux au milieu de ses richesses.

1 Ne témere quid loquáris,

1. Ne dis rien témérairement,

neque cor tuum sit velox ad proferéndum sermónem coram Deo.

et que ton cœur ne se hâte pas de proférer une parole devant Dieu.

Deus enim in cælo, et tu super terram ;

Car Dieu est dans le ciel, et toi sur la terre :

idcírco sint pauci sermónes tui.

à cause de cela, que tes paroles soient en petit nombre.

2 Multas curas sequúntur sómnia,

2. Les rêves suivent les soins multipliés ;

et in multis sermónibus inveniétur stultítia.

et c’est dans les discours multipliés que se trouvera la folie.

3 Si quid vovísti Deo,

3. Si tu as voué quelque chose à Dieu,

ne moréris réddere :

ne tarde pas à l’effectuer ;

dísplicet enim ei infidélis et stulta promíssio,

car la promesse infidèle et insensée lui déplait ;

sed quodcúmque vóveris redde :

mais tout ce que tu auras voué, effectue-le ;

4 multóque mélius est non vovére,

4. Parce qu’il vaut beaucoup mieux ne pas vouer,

quam post votum promíssa non réddere.

qu’après un vœu ne pas effectuer ses promesses.

5 Ne déderis os tuum ut peccáre fácias carnem tuam,

5. Ne permets pas que ta bouche fasse pécher ta chair,

neque dicas coram ángelo :

et ne dis pas devant l’ange :

Non est providéntia :

Il n’y a point de providence ;

ne forte irátus Deus contra sermónes tuos

de peur que Dieu, irrité contre tes paroles,

díssipet cuncta ópera mánuum tuárum.

ne détruise toutes les œuvres de tes mains.

6 Ubi multa sunt sómnia,

6. Où il y a beaucoup de rêves,

plúrimæ sunt vanitátes, et sermónes innúmeri ;

il y a beaucoup de vanités et des paroles sans nombre ;

tu vero Deum time.

mais toi, crains Dieu.

7 Si víderis calúmnias egenórum, et violénta judícia,

7. Si tu vois les oppressions des indigents et les jugements pleins de violence,

et subvérti justítiam in província,

et que la justice est renversée dans une province,

non miréris super hoc negótio :

ne t’en étonne pas ;

quia excélso excélsior est álius,

parce que celui qui est élevé en a un autre plus élevé que lui,

et super hos quoque eminentióres sunt álii ;

et qu’au-dessus d’eux il y en a d’autres encore plus élevés,

8 et ínsuper univérsæ terræ rex ímperat serviénti.

8. Et de plus, il y a un roi qui commande à la terre entière qui lui est assujettie.

9 Avárus non implébitur pecúnia,

9. L’avare ne sera point rassasié d’argent,

et qui amat divítias fructum non cápiet ex eis ;

et celui qui aime les richesses n’en recueillera point de fruit,

et hoc ergo vánitas.

et cela donc est vanité.

10 Ubi multæ sunt opes,

10. Où il y a beaucoup de biens,

multi et qui cómedunt eas.

il y a aussi beaucoup de gens qui les mangent.

Et quid prodest possessóri,

Et de quoi sert-il au possesseur,

nisi quod cernit divítias óculis suis ?

si ce n’est qu’il voit des richesses de ses yeux ?

11 Dulcis est somnus operánti,

11. Il est doux, le sommeil, à celui qui travaille,

sive parum sive multum cómedat ;

qu’il ait mangé peu ou beaucoup ;

satúritas autem dívitis non sinit eum dormíre.

mais la satiété du riche ne lui permet pas de dormir.

12 Est et ália infírmitas péssima quam vidi sub sole :

12. Il est aussi une maladie, très malheureuse, que j’ai vue sous le soleil :

divítiæ conservátæ in malum dómini sui.

des richesses conservées pour le malheur de leur maitre.

13 Péreunt enim in afflictióne péssima :

13. Il les voit périr avec une affliction très grande :

generávit fílium qui in summa egestáte erit.

il a engendré un fils qui sera dans une extrême détresse.

14 Sicut egréssus est nudus de útero matris suæ, sic revertétur,

14. Comme il est sorti nu du sein de sa mère,

et nihil áuferet secum de labóre suo.

ainsi il s’en retournera, et il n’emportera rien avec lui de son travail.

15 Miserábilis prorsus infírmitas :

15. Maladie tout à fait misérable :

quómodo venit, sic revertétur.

comme elle est venue, ainsi elle s’en retournera.

Quid ergo prodest ei quod laborávit in ventum ?

Que lui sert donc d’avoir travaillé pour le vent ?

16 cunctis diébus vitæ suæ comédit in ténebris,

16. Tous les jours de sa vie, il a mangé dans les ténèbres,

et in curis multis, et in ærúmna atque tristítia.

dans des soins multipliés, dans le chagrin et dans la tristesse.

17 Hoc ítaque visum est mihi bonum,

17. Ainsi donc il m’a paru bon

ut cómedat quis et bibat,

qu’un homme mange et boive,

et fruátur lætítia ex labóre suo

et qu’il goute la joie du travail

quo laborávit ipse sub sole,

dans lequel il s’est fatigué lui-même sous le soleil,

número diérum vitæ suæ

durant le nombre des jours de sa vie

quos dedit ei Deus ;

que lui a donnés Dieu ;

et hæc est pars illíus.

car c’est là sa part.

18 Et omni hómini cui dedit Deus divítias atque substántiam,

18. Et pour tout homme à qui Dieu a donné des richesses et du bien,

potestatémque ei tríbuit ut cómedat ex eis,

et à qui il a accordé le pouvoir d’en manger,

et fruátur parte sua, et lætétur de labóre suo :

et de jouir, de prendre sa part et de se réjouir de son travail,

hoc est donum Dei.

cela est un don de Dieu.

19 Non enim satis recordábitur diérum vitæ suæ,

19. Car il ne se souviendra pas beaucoup des jours de sa vie,

eo quod Deus óccupet delíciis cor ejus.

parce que Dieu occupe son cœur de délices.

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CHAP. V. 12. Job. XX, 20. — 14. Job. I, 21 ; I Tim. VI, 7.

 

5. Ne permets pas que ta bouche fasse pécher ta chair. Cette phrase est susceptible de plusieurs sens ; le plus simple et le plus naturel, comme se liant parfaitement à ce qui précède, nous a paru être : Ne te permets pas de prononcer aucun vœu témérairement ; parce que, en ne l’acquittant pas, tu te rendras coupable de péché. — Ta chair, pour te, toi. Voy. II, 3. — L’ange ; probablement le prêtre à qui il appartenait de prononcer sur les vœux (Lev. V, 4-8), et de la bouche duquel on recueillait l’explication de la loi, car le prophète Malachie (II, 7) l’appelle formellement l’ange du Seigneur. Saint Jean désigne aussi sous le nom d’anges les évêques (Apoc. I, 20, etc.).

15. Pour le vent. Les Hébreux employaient le mot vent pour exprimer ce qu’il y a de plus léger, de plus vain.

19. Pas beaucoup ; c’est le sens donné par les Septante ; c’est aussi celui du non satis ou pas assez de la Vulgate, expliqué par l’hébreu. Ainsi l’auteur veut dire qu’en usant avec modération du fruit de ses travaux, l’homme dont il est question au verset précédent trouvera sa vie courte, parce que Dieu remplit son cœur de délices qui la lui font passer agréablement.

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Qo 6

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CHAPITRE VI

Malheureuse condition de l’avare. Il a du bien, et il n’ose pas en jouir.

1 Est et áliud malum quod vidi sub sole,

1. Il y a encore un autre mal que j’ai vu sous le soleil,

et quidem frequens apud hómines :

et qui est même fréquent parmi les hommes :

2 vir cui dedit Deus divítias,

2. Un homme à qui Dieu a donné des richesses,

et substántiam, et honórem,

des biens et de l’honneur,

et nihil deest ánimæ suæ ex ómnibus quæ desíderat ;

en sorte que rien ne manque à son âme de tout ce qu’il désire ;

nec tríbuit ei potestátem Deus ut cómedat ex eo,

et Dieu ne lui a pas accordé de jouir de ces biens,

sed homo extráneus vorábit illud :

mais un homme étranger les dévorera :

hoc vánitas et miséria magna est.

cela est vanité et une grande misère.

3 Si genúerit quíspiam centum líberos,

3. Quand un homme aurait engendré cent enfants,

et víxerit multos annos,

qu’il aurait vécu beaucoup d’années,

et plures dies ætátis habúerit,

et qu’il serait d’un grand âge,

et ánima illíus non utátur bonis substántiæ suæ,

si son âme n’use pas des avantages de son bien,

sepulturáque cáreat :

qu’il soit même privé de la sépulture, de cet homme,

de hoc ergo pronúntio quod mélior illo sit abortívus.

moi je dis hardiment qu’un avorton vaut mieux que lui.

4 Frustra enim venit,

4. Car en vain il est venu,

et pergit ad ténebras,

et il s’en va dans les ténèbres,

et oblivióne delébitur nomen ejus.

et par l’oubli sera effacé son nom.

5 Non vidit solem,

5. Il n’a pas vu le soleil,

neque cognóvit distántiam boni et mali.

il n’a pas connu la distance du bien et du mal,

6 Etiam si duóbus míllibus annis víxerit,

6. Quand il aurait vécu deux mille ans,

et non fúerit perfrúitus bonis,

s’il n’a pas joui des biens ;

nonne ad unum locum próperant ómnia ?

toutes choses ne se hâtent-elles pas vers un seul lieu ?

7 Omnis labor hóminis in ore ejus ;

7. Tout le travail de l’homme est pour sa bouche ;

sed ánima ejus non implébitur.

mais son âme ne sera pas remplie.

8 Quid habet ámplius sápiens a stulto ?

8. Qu’a le sage de plus que l’insensé ?

et quid pauper, nisi ut pergat illuc ubi est vita ?

et qu’a le pauvre, sinon qu’il va là où est la vie ?

9 Mélius est vidére quod cúpias,

9. Mieux vaut voir ce que tu désires

quam desideráre quod néscias.

que désirer ce que tu ignores ;

Sed et hoc vánitas est, et præsúmptio spíritus.

mais cela aussi est vanité et présomption d’esprit.

10 Qui futúrus est, jam vocátum est nomen ejus ;

10. Celui qui doit être, son nom déjà a été nommé,

et scitur quod homo sit,

et l’on sait que c’est un homme,

et non possit contra fortiórem se in judício conténdere.

et qu’il ne peut, contre celui qui est plus fort que lui, disputer en jugement.

11 Verba sunt plúrima,

11. On dit beaucoup de paroles,

multámque in disputándo habéntia vanitátem.

et, dans la dispute, elles sont d’une grande inanité.

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CHAP. VI.

 

1. * La 3e section embrasse les chapitres VI-VIII, 15. Elle montre que le bonheur n’est pas dans la recherche des richesses ni de la réputation. La sagesse pratique consiste à prendre les choses comme Dieu les envoie, à être patient, à ne pas se livrer aux récriminations, à obéir aux supérieurs.

2. À son âme ; hébraïsme, pour à sa personne, à lui.

10. Celui qui doit être, etc. Les hommes ont toujours été hommes, naissant toujours de la même manière, faibles, malheureux, etc. Ainsi celui qui doit naitre un jour à venir est déjà connu ; son nom d’homme, connu par avance, indique déjà ce qu’il sera.

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Qo 7

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CHAPITRE VII

Vaine curiosité. Bonne réputation. Utilité des corrections. Avantage de la sagesse. Point de juste qui ne pèche. Négliger les discours des hommes. La femme dangereuse.

1 Quid necésse est hómini majóra se quǽrere,

1. Qu’est-il nécessaire à l’homme de rechercher ce qui est au-dessus de lui,

cum ignóret quid condúcat sibi in vita sua,

lorsqu’il ignore ce qui lui est avantageux dans sa vie,

número diérum peregrinatiónis suæ,

durant le nombre des jours de son pèlerinage,

et témpore quod velut umbra prǽterit ?

et dans le temps qui comme l’ombre passe ?

aut quis ei póterit indicáre

ou qui pourra lui indiquer

quod post eum futúrum sub sole sit ?

ce qui après lui doit arriver sous le soleil ?

2 Mélius est nomen bonum quam unguénta pretiósa,

2. Mieux vaut une bonne réputation que les parfums précieux ;

et dies mortis die nativitátis.

et le jour de la mort que le jour de la naissance.

3 Mélius est ire ad domum luctus

3. Mieux vaut aller dans une maison de deuil

quam ad domum convívii ;

que dans une maison de festin ;

in illa enim finis cunctórum admonétur hóminum,

car dans celle-là on est averti de la fin de tous les hommes,

et vivens cógitat quid futúrum sit.

et le vivant pense à ce qui doit arriver.

4 Mélior est ira risu,

4. Mieux vaut la colère que le rire,

quia per tristítiam vultus corrígitur ánimus delinquéntis.

parce que par la tristesse du visage est corrigé le cœur de celui qui pèche.

5 Cor sapiéntium ubi tristítia est,

5. Le cœur des sages est où est la tristesse ;

et cor stultórum ubi lætítia.

et le cœur des insensés où est la joie.

6 Mélius est a sapiénte córripi,

6. Mieux vaut être repris par un sage

quam stultórum adulatióne décipi ;

que d’être trompé par les flatteries des insensés ;

7 quia sicut sónitus spinárum ardéntium sub olla,

7. Parce que, comme est le pétillement des épines qui brulent sous une marmite,

sic risus stulti.

ainsi est le rire de l’insensé ;

Sed et hoc vánitas.

mais cela même est vanité.

8 Calúmnia contúrbat sapiéntem,

8. L’oppression trouble le sage,

et perdet robur cordis illíus.

et elle détruira la force de son cœur.

9 Mélior est finis oratiónis quam princípium.

9. Mieux vaut la fin d’un discours que le commencement.

Mélior est pátiens arrogánte.

Mieux vaut un homme patient qu’un arrogant.

10 Ne sis velox ad irascéndum,

10. Ne sois pas prompt à te mettre en colère ;

quia ira in sinu stulti requiéscit.

parce que la colère repose dans le sein de l’insensé.

11 Ne dicas : Quid putas causæ est

11. Ne dis pas : Quelle est la cause, penses-tu,

quod prióra témpora melióra fuére quam nunc sunt ?

que les temps anciens furent meilleurs qu’ils ne sont maintenant ?

stulta enim est hujuscémodi interrogátio.

car insensée est une question de ce genre.

12 Utílior est sapiéntia cum divítiis,

12. La sagesse est plus utile avec les richesses,

et magis prodest vidéntibus solem.

et elle sert davantage à ceux qui voient le soleil.

13 Sicut enim prótegit sapiéntia, sic prótegit pecúnia ;

13. Car comme la sagesse protège, l’argent protège aussi ;

hoc autem plus habet erudítio et sapiéntia,

mais l’instruction a cela de plus,

quod vitam tríbuunt possessóri suo.

ainsi que la sagesse, qu’elles donnent la vie à leur possesseur.

14 Consídera ópera Dei,

14. Considère les œuvres de Dieu :

quod nemo possit corrígere quem ille despéxerit.

personne ne peut corriger celui qu’il méprise.

15 In die bona frúere bonis,

15. Au jour heureux, jouis des biens,

et malam diem prǽcave ;

et précautionne-toi contre le mauvais jour ;

sicut enim hanc, sic et illam fecit Deus,

car comme l’un, ainsi il a fait l’autre,

ut non invéniat homo contra eum justas querimónias.

sans que l’homme trouve contre lui de justes plaintes.

16 Hæc quoque vidi in diébus vanitátis meæ :

16. J’ai encore vu ceci dans les jours de ma vanité :

justus perit in justítia sua,

le juste périt dans sa justice,

et ímpius multo vivit témpore in malítia sua.

et l’impie vit longtemps dans sa malice.

17 Noli esse justus multum,

17. Ne sois point juste à l’excès,

neque plus sápias quam necésse est,

ni plus sage qu’il n’est nécessaire,

ne obstupéscas.

pour que tu ne deviennes pas insensible.

18 Ne ímpie agas multum,

18. N’agis pas en impie à l’excès ;

et noli esse stultus,

et ne sois pas insensé,

ne moriáris in témpore non tuo.

afin que tu ne meures pas dans un temps qui n’est pas le tien.

19 Bonum est te sustentáre justum :

19. Il est bon que tu soutiennes le juste ;

sed et ab illo ne súbtrahas manum tuam ;

mais même ne retire pas de celui-là ta main,

quia qui timet Deum nihil négligit.

parce que celui qui craint Dieu ne néglige rien.

20 Sapiéntia confortávit sapiéntem

20. La sagesse a rendu le sage plus fort

super decem príncipes civitátis ;

que dix princes d’une cité.

21 non est enim homo justus in terra

21. Car il n’est pas d’homme juste sur la terre

qui fáciat bonum et non peccet.

qui fasse le bien et ne pèche point.

22 Sed et cunctis sermónibus qui dicúntur

22. Mais surtout, à toutes les paroles

ne accómodes cor tuum,

qui se disent, ne prête pas ton cœur ;

ne forte áudias servum tuum maledicéntem tibi ;

de peur que tu n’entendes ton serviteur te maudire ;

23 scit enim consciéntia tua

23. Car ta conscience sait

quia et tu crebro maledixísti áliis.

que toi-même tu as fréquemment maudit les autres.

24 Cuncta tentávi in sapiéntia.

24. J’ai tout tenté avec la sagesse.

Dixi : Sápiens effíciar :

J’ai dit : Je deviendrai sage,

et ipsa lóngius recéssit a me,

et la sagesse s’est retirée bien loin de moi.

25 multo magis quam erat.

25. Beaucoup plus loin qu’elle n’était,

Et alta profúnditas, quis invéniet eam ?

et grande est sa profondeur ; qui la trouvera ?

26 Lustrávi univérsa ánimo meo,

26. J’ai parcouru toutes choses avec mon esprit,

ut scirem et considerárem,

afin de savoir, de considérer,

et quǽrerem sapiéntiam, et ratiónem,

et de chercher la sagesse et la raison des choses,

et ut cognóscerem impietátem stulti,

et de connaitre l’impiété de l’insensé

et errórem imprudéntium :

et l’erreur des imprudents :

27 et invéni amariórem morte mulíerem,

27. Et j’ai trouvé la femme plus amère que la mort ;

quæ láqueus venatórum est,

elle est un lacs de chasseur,

et sagéna cor ejus ;

son cœur est un filet,

víncula sunt manus illíus.

ses mains sont des chaines.

Qui placet Deo effúgiet illam ;

Celui qui plaît à Dieu lui échappera ;

qui autem peccátor est capiétur ab illa.

mais celui qui est pécheur sera pris par elle.

28 Ecce hoc invéni, dixit Ecclesiástes,

28. Voilà ce que j’ai trouvé, dit l’Ecclésiaste,

unum et álterum ut invenírem ratiónem,

une chose et une autre, afin de trouver une raison,

29 quam adhuc quærit ánima mea,

29. Que cherche encore mon âme,

et non invéni.

et que je n’ai pas trouvée.

Virum de mille unum réperi ;

J’ai trouvé un homme entre mille ;

mulíerem ex ómnibus non invéni.

une femme entre toutes, je ne l’ai pas trouvée.

30 Solúmmodo hoc invéni,

30. J’ai trouvé cela seulement,

quod fécerit Deus hóminem rectum,

que Dieu a fait l’homme droit,

et ipse se infinítis miscúerit quæstiónibus.

et que celui-ci s’est embarrassé lui-même dans des questions infinies.

Quis talis ut sápiens est ?

Qui est tel que le sage ?

et quis cognóvit solutiónem verbi ?

et qui connait la solution de la parole ?

~

CHAP. VII. 2. Prov. XXII, 1. — 21. III Reg. VIII, 46 ; II Par. VI, 36 ; Prov. XX, 9 ; I Joan. I, 8.

 

4. Mieux vaut la colère ; c’est-à-dire le ton sévère, d’un homme juste, par exemple, que le rire ou l’approbation du méchant, parce qu’en effet le regard sévère du premier et la tristesse de son visage peuvent faire sur le pécheur une impression salutaire, et le porter à se corriger.

8. L’oppression (calumnia). Voy. Prov. XIV, 31.

17. À l’excès ; c’est le sens qu’a ici, comme dans bien d’autres passages, le multum de la Vulgate. D’ailleurs le contexte, dans ce verset, suffirait seul pour le justifier.

18. N’agis pas, etc. Si le sage conseille, comme on vient de le voir, de ne pas excéder dans la justice et la sagesse, à plus forte raison fera-t-il la même recommandation, quand il s’agira du mal et de l’impiété. Ainsi, en défendant d’être trop impie, il ne permet pas pour cela de l’être un peu : il veut dire seulement que puisque la vie de l’homme ne peut être sans défaut et sans péché, il faut au moins éviter les grands désordres, les chutes trop fréquentes, les mauvaises habitudes. — Qui n’est pas le tien ; prématuré, avant ton temps.

19. De celui-là ; c’est-à-dire de l’impie, nommé au vers. 16. — Ne néglige rien ; aucune occasion de faire le bien.

30. Qui est tel que le sage ? qui est semblable au sage ? — Qui connait, etc. ; qui est assez éclairé pour comprendre ce qui vient d’être dit, et pouvoir donner la solution complète des grandes questions relatives à la condition présente des hommes, au penchant qui les entraine au mal, à leur aveuglement et à leur état de misère ? — Dans le texte hébreu, les mots : Qui est… parole, forment le commencement du chap. VIII, et le sens de ce texte parait être : Qui sait l’explication des choses ? D’autant que l’hébreu dâbâr signifie chose aussi bien que parole (la Vulgate elle-même l’a rendu, VIII, 3, par opus), et qu’il s’emploie souvent pour le pluriel.

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Qo 8

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CHAPITRE VIII

Ne point s’éloigner des commandements de Dieu. Patience de Dieu. Affliction des justes. Prospérité des méchants.

1 Sapiéntia hóminis lucet in vultu ejus,

1. La sagesse de l’homme luit sur son visage,

et potentíssimus fáciem illíus commutábit.

et le tout-puissant changera sa face.

2 Ego os regis obsérvo,

2. Pour moi j’observe la bouche du roi,

et præcépta juraménti Dei.

et les préceptes du serment de Dieu.

3 Ne festínes recédere a fácie ejus,

3. Ne te hâte pas de te retirer de devant sa face,

neque permáneas in ópere malo :

et ne persévère pas dans une œuvre mauvaise ;

quia omne quod volúerit fáciet.

parce que tout ce qu’il voudra, il le fera ;

4 Et sermo illíus potestáte plenus est,

4. Et sa parole est pleine de puissance ;

nec dícere ei quisquam potest : Quare ita facis ?

et nul ne peut lui dire : Pourquoi faites-vous ainsi ?

5 Qui custódit præcéptum non experiétur quidquam mali.

5. Celui qui garde le précepte n’éprouvera rien de mal.

Tempus et responsiónem cor sapiéntis intélligit.

Le temps et la réponse, le cœur du sage les comprend.

6 Omni negótio tempus est, et opportúnitas :

6. À toute chose est son temps et son opportunité,

et multa hóminis afflíctio,

et grande est l’affliction de l’homme,

7 quia ignórat prætérita,

7. Parce qu’il ignore les choses passées, et que les futures,

et futúra nullo scire potest núntio.

il ne peut les savoir par aucun messager.

8 Non est in hóminis potestáte prohibére spíritum,

8. Il n’est pas au pouvoir de l’homme de retenir le souffle de la vie ;

nec habet potestátem in die mortis :

et il n’a pas de pouvoir au jour de la mort ;

nec sínitur quiéscere ingruénte bello,

il ne lui est pas permis de se reposer, la guerre éclatant :

neque salvábit impíetas ímpium.

et l’impiété ne sauvera pas l’impie.

9 Omnia hæc considerávi,

9. J’ai considéré toutes ces choses,

et dedi cor meum in cunctis opéribus quæ fiunt sub sole.

et j’ai appliqué mon cœur à toutes les œuvres qui se font sous le soleil.

Intérdum dominátur homo hómini in malum suum.

Quelquefois l’homme domine un homme pour son propre malheur.

10 Vidi ímpios sepúltos,

10. J’ai vu des impies ensevelis,

qui étiam cum adhuc víverent

qui, lors même qu’ils vivaient,

in loco sancto erant,

étaient dans le lieu saint

et laudabántur in civitáte

et étaient loués dans la cité,

quasi justórum óperum.

comme si leurs œuvres eussent été justes ;

Sed et hoc vánitas est.

mais cela aussi est vanité.

11 Etenim quia non profértur cito contra malos senténtia,

11. Car, parce que la sentence n’est pas portée promptement contre les méchants,

absque timóre ullo

les fils des hommes, sans aucune crainte,

fílii hóminum pérpetrant mala.

commettent le mal.

12 Attamen peccátor ex eo quod cénties facit malum,

12. Et cependant, parce que le pécheur, cent fois, fait le mal

et per patiéntiam sustentátur ;

et qu’avec patience il est supporté,

ego cognóvi quod erit bonum timéntibus Deum,

j’ai connu, moi, que le bien sera pour ceux

qui veréntur fáciem ejus.

qui craignent Dieu, qui révèrent sa face.

13 Non sit bonum ímpio,

13. Que le bien ne soit pas pour l’impie ;

nec prolongéntur dies ejus,

que ses jours ne soient pas prolongés ;

sed quasi umbra tránseant qui non timent fáciem Dómini.

mais que, comme l’ombre, ils passent, ceux qui ne craignent pas la face du Seigneur.

14 Est et ália vánitas quæ fit super terram :

14. Il est une autre vanité qui a lieu sur la terre ;

sunt justi quibus mala provéniunt

il y a des justes à qui les maux arrivent,

quasi ópera égerint impiórum :

comme s’ils avaient fait les œuvres des impies,

et sunt ímpii qui ita secúri sunt

et il y a des impies qui vivent dans la sécurité,

quasi justórum facta hábeant.

comme s’ils avaient pour eux les actions des justes ;

Sed et hoc vaníssimum júdico.

mais cela aussi je le juge très vain.

15 Laudávi ígitur lætítiam ;

15. J’ai donc loué la joie, parce qu’il n’était,

quod non esset hómini bonum sub sole,

pour l’homme, de bien sous le soleil

nisi quod coméderet, et bíberet, atque gaudéret,

que de manger, de boire et de se réjouir ;

et hoc solum secum auférret de labóre suo,

et que c’était cela seul qu’il emportait avec lui de son travail

in diébus vitæ suæ quos dedit ei Deus sub sole.

durant les jours de sa vie, que lui a donnés Dieu, sous le soleil.

16 Et appósui cor meum ut scirem sapiéntiam,

16. Et j’ai appliqué mon cœur à connaitre la sagesse,

et intellígerem distentiónem quæ versátur in terra.

et à comprendre la tension d’esprit qui règne sur la terre.

Est homo qui diébus et nóctibus somnum non capit óculis.

Il est tel homme qui, les jours et les nuits, ne prend pas de sommeil pour ses yeux.

17 Et intelléxi quod ómnium óperum Dei

17. Et j’ai compris que l’homme ne peut trouver

nullam possit homo inveníre ratiónem

aucune raison de toutes les œuvres de Dieu,

eórum quæ fiunt sub sole ;

qui se font sous le soleil,

et quanto plus laboráverit ad quæréndum,

et que plus il travaille pour chercher,

tanto minus invéniat :

moins il trouve.

étiam si díxerit sápiens se nosse, non póterit reperíre.

Quand même le sage dirait qu’il sait, il ne pourra rien trouver.

~

CHAP. VIII. 1. Supra. II, 14.

 

1. La sagesse luit, se fait remarquer sur le visage du sage, et le Tout-Puissant change son visage, selon les circonstances ; par exemple, il lui donnera un air triste ou joyeux, selon que le sage se trouvera avec des gens qui seront dans la tristesse ou dans la joie.

2. La bouche ; c’est-à-dire ce qui sort de la bouche, les paroles, les ordres. On a déjà remarqué que cette sorte de métonymie était très usitée dans la Bible. — Les préceptes, etc., pour les préceptes que Dieu a donnés avec serment.

10. Comme si leurs œuvres eussent été justes ; littér. comme de justes œuvres (quasi justorum operum) ; ce génitif est gouverné par le mot hommes (viri) sous-entendu.

15. Le but de l’auteur dans ce verset n’est nullement de recommander une vie molle et voluptueuse. Voy. II, 24.

16. * La 4e et dernière section du livre de l’Ecclésiaste commence ici au verset 16 et elle s’étend jusqu’au chapitre XII, 7. Elle donne le résumé des recherches et des expériences des trois sections précédentes et la conclusion finale. Il est impossible à la sagesse humaine d’approfondir l’œuvre de Dieu, VIII, 16-17 ; les bons, comme les méchants, sont soumis à la Providence dont la volonté est inscrutable, IX, 1-2 ; ils doivent mourir et être oubliés, IX, 3-6 ; nous devons donc jouir de la vie en attendant la mort, IX, 7-10 ; le succès ne récompense pas toujours les efforts de l’habile et du sage, IX, 11-12 ; la sagesse, quoique avantageuse en bien des cas, est souvent un objet de mépris pour la folie, IX, 13-X, 3. Nous devons être patients et obéir à ceux qui gouvernent, même quand ils sont injustes, parce que la résistance ne ferait qu’accroitre nos maux, X, 4-11 : la prudence dans les choses de la vie vaut mieux que la folie, X, 12-26. Il faut être charitable, dussions-nous faire des ingrats, car ceux à qui nous faisons du bien peuvent après tout nous en être reconnaissants, XI, 1-2. Nous devons toujours travailler, puisque nous ignorons lesquels de nos efforts seront couronnés de succès, et rendre par ce travail la vie agréable, XI, 3-8. Néanmoins, comme tout cela ne satisfait point l’âme, l’Ecclésiaste conclut en définitive que la pensée du jugement dernier doit être la règle de notre vie, XI, 9-10, et que nous devons vivre depuis notre jeunesse jusqu’à la vieillesse dans la crainte de Dieu et du jugement final, dans lequel tout sera expliqué, XII, 1-7.

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CHAPITRE IX

Nul ne sait s’il est digne d’amour ou de haine. Égale condition des bons et des méchants en ce monde. Faire le bien tandis qu’on le peut. Sagesse du pauvre méprisée.

1 Omnia hæc tractávi in corde meo,

1. J’ai agité toutes ces choses dans mon cœur,

ut curióse intellígerem.

afin de tâcher de les comprendre.

Sunt justi atque sapiéntes,

Il y a des justes et des sages,

et ópera eórum in manu Dei ;

et leurs œuvres sont dans la main de Dieu :

et tamen nescit homo utrum amóre an ódio dignus sit.

et cependant l’homme ne sait s’il est digne d’amour ou de haine ;

2 Sed ómnia in futúrum servántur incérta,

2. Mais toutes choses sont réservées pour l’avenir, étant incertaines dans le présent,

eo quod univérsa æque evéniant justo et ímpio,

parce que tout arrive également au juste et à l’impie,

bono et malo, mundo et immúndo,

au bon et au méchant, au pur et à l’impur,

immolánti víctimas et sacrifícia contemnénti.

à celui qui immole des victimes et à celui qui méprise les sacrifices ;

Sicut bonus, sic et peccátor ;

comme est le bon, ainsi est le pécheur ;

ut perjúrus, ita et ille qui verum déjerat.

comme est le parjure, ainsi est celui-là même qui jure la vérité.

3 Hoc est péssimum inter ómnia quæ sub sole fiunt :

3. Ce qu’il y a de plus fâcheux parmi toutes les choses qui se passent sous le soleil,

quia éadem cunctis evéniunt.

c’est que les mêmes choses arrivent à tous :

Unde et corda filiórum hóminum impléntur malítia

de là aussi les cœurs des fils des hommes

et contémptu in vita sua,

sont remplis de malice et de mépris durant leur vie,

et post hæc ad ínferos deducéntur.

et après cela ils seront conduits aux enfers.

4 Nemo est qui semper vivat, et qui hujus rei hábeat fidúciam ;

4. Il n’est personne qui vive toujours et qui en ait même l’espérance :

mélior est canis vivus leóne mórtuo.

mieux vaut un chien vivant qu’un lion mort.

5 Vivéntes enim sciunt se esse moritúros ;

5. Car les vivants savent qu’ils doivent mourir ;

mórtui vero nihil novérunt ámplius,

mais les morts ne connaissent plus rien,

nec habent ultra mercédem,

et ils n’ont plus de récompense,

quia oblivióni trádita est memória eórum.

parce qu’à l’oubli a été livrée leur mémoire.

6 Amor quoque, et ódium, et invídiæ simul periérunt ;

6. L’amour aussi et la haine et l’envie ont péri avec eux,

nec habent partem in hoc sǽculo,

et ils n’ont point de part en ce siècle,

et in ópere quod sub sole géritur.

ni dans l’œuvre qui se fait sous le soleil.

7 Vade ergo, et cómede in lætítia panem tuum,

7. Va donc et mange ton pain dans l’allégresse,

et bibe cum gáudio vinum tuum,

et bois ton vin dans la joie ;

quia Deo placent ópera tua.

parce qu’à Dieu plaisent tes œuvres.

8 Omni témpore sint vestiménta tua cándida,

8. Qu’en tout temps tes vêtements soient blancs,

et óleum de cápite tuo non defíciat.

et que l’huile ne cesse pas de parfumer ta tête.

9 Perfrúere vita cum uxóre quam díligis,

9. Jouis complètement de la vie avec l’épouse que tu aimes

cunctis diébus vitæ instabilitátis tuæ,

tous les jours de ta vie fugitive,

qui dati sunt tibi sub sole omni témpore vanitátis tuæ :

jours qui t’ont été donnés sous le ciel, durant tout le temps de ta vanité :

hæc est enim pars in vita

car c’est là ta part dans la vie

et in labóre tuo quo labóras sub sole.

et dans ton travail auquel tu travailles sous le soleil.

10 Quodcúmque fácere potest manus tua,

10. Tout ce que peut faire ta main,

instánter operáre,

fais-le promptement,

quia nec opus, nec rátio, nec sapiéntia, nec sciéntia

parce que ni œuvre, ni raison, ni sagesse, ni science

erunt apud ínferos, quo tu próperas.

ne seront aux enfers, où tu cours.

11 Verti me ad áliud, et vidi sub sole

11. Je me suis tourné vers une autre chose,

nec velócium esse cursum,

et j’ai vu sous le soleil que la course n’est pas pour les prompts,

nec fórtium bellum,

ni la guerre pour les vaillants,

nec sapiéntium panem,

ni le pain pour les sages,

nec doctórum divítias,

ni les richesses pour les savants,

nec artíficum grátiam ;

ni la faveur pour les ouvriers habiles,

sed tempus casúmque in ómnibus.

mais le temps et le hasard font toutes choses.

12 Nescit homo finem suum ;

12. L’homme ne connait pas sa fin :

sed sicut pisces capiúntur hamo,

et comme les poissons sont pris à l’hameçon,

et sicut aves láqueo comprehendúntur,

et comme les oiseaux sont retenus par le lacs,

sic capiúntur hómines in témpore malo,

ainsi sont pris les hommes par un temps mauvais,

cum eis extémplo supervénerit.

lorsque tout d’un coup il leur survient.

13 Hanc quoque sub sole vidi sapiéntiam,

13. J’ai aussi vu sous le soleil cette sagesse,

et probávi máximam :

et je l’ai estimée très grande :

14 cívitas parva, et pauci in ea viri ;

14. Une petite cité, et peu d’hommes en elle :

venit contra eam rex magnus, et vallávit eam,

il vint contre elle un grand roi, il l’investit,

exstruxítque munitiónes per gyrum, et perfécta est obsídio.

bâtit des forts autour, et le siège fut complet.

15 Inventúsque est in ea vir pauper et sápiens,

15. Or, il s’y trouva un homme pauvre et sage,

et liberávit urbem per sapiéntiam suam ;

et il délivra la ville par sa sagesse ;

et nullus deínceps recordátus est hóminis illíus páuperis.

et nul dans la suite ne se ressouvint de cet homme pauvre.

16 Et dicébam ego meliórem esse sapiéntiam fortitúdine.

16. Et je disais, moi, que la sagesse vaut mieux que la force.

Quómodo ergo sapiéntia páuperis contémpta est,

Comment donc la sagesse du pauvre a-t-elle été méprisée,

et verba ejus non sunt audíta ?

et ses paroles n’ont-elles pas été écoutées ?

17 Verba sapiéntium audiúntur in siléntio,

17. Les paroles des sages sont écoutées en silence,

plus quam clamor príncipis inter stultos.

plus que les cris du prince parmi les insensés.

18 Mélior est sapiéntia quam arma béllica ;

18. Vaut mieux la sagesse que les armes guerrières :

et qui in uno peccáverit, multa bona perdet.

et celui qui pèche en un seul point perdra de grands biens.

~

CHAP. IX.

 

1. Afin de tâcher de les comprendre ; littér. afin de les comprendre avec soin, avec empressement de savoir (curiose).

5. Ils n’ont plus de récompense ; c’est-à-dire ils n’ont plus aucun moyen de mériter la récompense qui leur était promise, et qu’ils ont négligée.

7. Va donc, etc. Voy., pour le vrai sens de ces paroles, II, 24.

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CHAPITRE X

Suites funestes de l’imprudence. Imprudents et esclaves élevés en dignité. Caractère du médisant. Roi enfant. Prince débauché. Ne point médire du roi.

1 Muscæ moriéntes perdunt suavitátem unguénti.

1. Les mouches mourant gâtent la suavité d’un parfum.

Pretiósior est sapiéntia et glória,

Une folie légère et de courte durée

parva et ad tempus stultítia.

prévaut sur la sagesse et la gloire.

2 Cor sapiéntis in déxtera ejus,

2. Le cœur du sage est dans sa droite,

et cor stulti in sinístra illíus.

et le cœur de l’insensé dans sa gauche.

3 Sed et in via stultus ámbulans,

3. Mais même l’insensé qui marche dans sa voie,

cum ipse insípiens sit,

comme il est lui-même dépourvu de sagesse,

omnes stultos ǽstimat.

il estime tous les hommes insensés.

4 Si spíritus potestátem habéntis ascénderit super te,

4. Si l’esprit de celui qui a le pouvoir s’élève contre toi,

locum tuum ne demíseris,

ne quitte pas ta place,

quia curátio fáciet cessáre peccáta máxima.

parce que le remède fera cesser les plus grands péchés.

5 Est malum quod vidi sub sole,

5. Il est un mal que j’ai vu sous le soleil,

quasi per errórem egrédiens a fácie príncipis :

sortant comme par erreur de la face du prince :

6 pósitum stultum in dignitáte sublími,

6. L’insensé élevé à une haute dignité,

et dívites sedére deórsum.

et des riches assis en bas.

7 Vidi servos in equis,

7. J’ai vu des esclaves sur des chevaux,

et príncipes ambulántes super terram quasi servos.

et des princes marchant sur la terre comme des esclaves.

8 Qui fodit fóveam íncidet in eam,

8. Celui qui creuse une fosse y tombera,

et qui díssipat sepem mordébit eum cóluber.

et celui qui détruit une haie, un serpent le mordra.

9 Qui transfert lápides affligétur in eis,

9. Celui qui transporte des pierres en sera meurtri ;

et qui scindit ligna vulnerábitur ab eis.

et celui qui fend du bois en sera blessé.

10 Si retúsum fúerit ferrum,

10. Si le fer a perdu son tranchant,

et hoc non ut prius, sed hebetátum fúerit,

et qu’il ne soit pas comme auparavant, mais qu’il soit émoussé,

multo labóre exacuétur,

c’est avec beaucoup de travail qu’on l’aiguisera :

et post indústriam sequétur sapiéntia.

ainsi après l’application viendra la sagesse.

11 Si mórdeat serpens in siléntio,

11. Si un serpent mord dans le silence,

nihil eo minus habet qui occúlte détrahit.

celui qui médit en cachette n’a rien de moins que ce serpent.

12 Verba oris sapiéntis grátia,

12. Les paroles de la bouche du sage sont pleines de grâce ;

et lábia insipiéntis præcipitábunt eum ;

et les lèvres de l’insensé le précipiteront ;

13 inítium verbórum ejus stultítia,

13. Le commencement de ses paroles est la folie,

et novíssimum oris illíus error péssimus.

et la dernière de sa bouche une erreur très funeste.

14 Stultus verba multíplicat.

14. L’insensé multiplie les paroles.

Ignórat homo quid ante se fúerit ;

L’homme ignore ce qui a été avant lui ;

et quid post se futúrum sit, quis ei póterit indicáre ?

et ce qui doit être après lui, qui pourra le lui indiquer ?

15 Labor stultórum afflíget eos,

15. Le travail des insensés les affligera,

qui nésciunt in urbem pérgere.

eux qui ne savent pas aller à la ville.

16 Væ tibi, terra, cujus rex puer est,

16. Malheur à toi, terre dont le roi est un enfant,

et cujus príncipes mane cómedunt.

et dont les princes mangent dès le matin.

17 Beáta terra cujus rex nóbilis est,

17. Bienheureuse la terre dont le roi est noble,

et cujus príncipes vescúntur in témpore suo,

et dont les princes mangent en leur temps,

ad reficiéndum, et non ad luxúriam.

pour se refaire et non pour la sensualité.

18 In pigrítiis humiliábitur contignátio,

18. Par la paresse s’affaissera la charpente ;

et in infirmitáte mánuum perstillábit domus.

et par la faiblesse des mains dégouttera la maison.

19 In risum fáciunt panem et vinum

19. Les vivants emploient le pain en divertissement,

ut epuléntur vivéntes ;

et le vin pour leurs festins ;

et pecúniæ obédiunt ómnia.

et à l’argent toutes choses obéissent.

20 In cogitatióne tua regi ne détrahas,

20. Dans ta pensée ne médis pas du roi,

et in secréto cubículi tui ne maledíxeris díviti :

et dans le secret de ta chambre ne maudis pas le riche,

quia et aves cæli portábunt vocem tuam,

parce que même les oiseaux du ciel porteront ta voix,

et qui habet pennas annuntiábit senténtiam.

et celui qui a des ailes publiera ton sentiment.

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CHAP. X. 8. Esth. VII, 10 ; Prov. XXVI, 27 ; XXVIII, 10 ; Ps. VII, 16 ; IX, 16, 23 ; LVI, 7 ; Eccli. XXVII, 29.

 

1. Les mouches qui meurent dans un parfum en font perdre la bonne odeur. — Une folie, etc. Il y a une certaine folie qui l’emporte sur la sagesse et la gloire. Pour être véritablement sage, il faut devenir insensé aux yeux du monde. Or, cette folie, suivant saint Paul, vaut mieux que toute la prétendue sagesse humaine, qui, en effet, selon le même apôtre, n’est que folie devant Dieu. Voy. I Cor. I, 25 ; III, 18.

4. Si l’esprit, etc. Le sens le plus naturel de ce verset est : Si un grand, un homme puissant est irrité contre toi, ne quitte pas ta place ; c’est-à-dire ne te décourage pas, mais sois modéré et doux ; car, par ce moyen, tu éviteras et tu feras éviter les plus grandes fautes. Remarquons que le terme hébreu rendu dans la Vulgate par remède (curatio) signifie aussi modération, douceur, soit dans les paroles, soit dans la manière d’agir ; signification qui convient parfaitement dans ce passage.

5. Sortant, etc. ; c’est-à-dire qu’on ne peut considérer que comme une faute d’ignorance du prince, comme un manque de sagesse ou d’attention de sa part.

11. N’a rien de moins, etc. ; le médisant ne diffère en rien du serpent ; il n’est pas moins dangereux.

15. Le travail, etc. L’insensé est si paresseux, que tout travail le lasse et l’accable ; il est en même temps si ignorant et si stupide, qu’il ignore jusqu’au chemin de la ville.

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Qo 11

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CHAPITRE XI

Faire l’aumône. Œuvres de Dieu inconnues. Avoir sans cesse devant les yeux le jugement de Dieu. Vanité de la jeunesse.

1 Mitte panem tuum super transeúntes aquas,

1. Répands ton pain sur les eaux qui passent ;

quia post témpora multa invénies illum.

parce qu’après beaucoup de temps tu le trouveras.

2 Da partem septem necnon et octo,

2. Donnes-en une part à sept et même à huit ;

quia ignóras quid futúrum sit mali super terram.

parce que tu ignores ce qui doit arriver de mal sur la terre.

3 Si replétæ fúerint nubes,

3. Si les nuées sont pleines,

imbrem super terram effúndent.

elles répandront la pluie sur la terre.

Si cecíderit lignum ad austrum aut ad aquilónem,

Si l’arbre tombe au midi ou à l’aquilon,

in quocúmque loco cecíderit, ibi erit.

en quelque lieu qu’il tombe, il y sera.

4 Qui obsérvat ventum non séminat ;

4. Celui qui observe le vent ne sème pas ;

et qui consíderat nubes numquam metet.

et celui qui considère les nuées jamais ne moissonnera.

5 Quómodo ignóras quæ sit via spíritus,

5. Comme tu ignores quelle est la voie de l’âme,

et qua ratióne compingántur ossa in ventre prægnántis,

et de quelle manière sont liés les os dans le sein d’une femme enceinte ;

sic nescis ópera Dei,

ainsi tu ne sais pas les œuvres de Dieu,

qui fabricátor est ómnium.

qui est le créateur de toutes choses.

6 Mane sémina semen tuum,

6. Dès le matin, sème ton grain,

et véspere ne cesset manus tua :

et que, le soir, ta main ne cesse pas ;

quia nescis quid magis oriátur, hoc aut illud ;

parce que tu ne sais pas lequel lèvera plutôt, celui-ci ou celui-là :

et si utrúmque simul, mélius erit.

et si l’un et l’autre lèvent ensemble, ce sera mieux.

7 Dulce lumen,

7. Douce est la lumière ;

et delectábile est óculis vidére solem.

et il est délectable aux yeux de voir le soleil.

8 Si annis multis víxerit homo,

8. Si un homme a vécu un grand nombre d’années,

et in his ómnibus lætátus fúerit,

et qu’en tout il se soit réjoui,

meminísse debet tenebrósi témporis, et diérum multórum,

il doit se souvenir des temps de ténèbres et de ces jours nombreux,

qui cum vénerint, vanitátis arguéntur prætérita.

qui, lorsqu’ils seront venus, convaincront de vanité tout le passé.

9 Lætáre ergo, júvenis, in adolescéntia tua,

9. Réjouis-toi donc jeune homme, en ton adolescence ;

et in bono sit cor tuum in diébus juventútis tuæ :

et qu’heureux soit ton cœur dans les jours de ta jeunesse ;

et ámbula in viis cordis tui,

marche dans les voies de ton cœur

et in intúitu oculórum tuórum,

et dans les regards de tes yeux ;

et scito quod pro ómnibus his addúcet te Deus in judícium.

mais sache que pour toutes ces choses Dieu t’appellera en jugement.

10 Aufer iram a corde tuo,

10. Bannis la colère de ton cœur,

et ámove malítiam a carne tua :

et écarte la malice de ta chair.

adolescéntia enim et volúptas vana sunt.

Car l’adolescence et la volupté sont choses vaines.

~

CHAP. XI.

 

1. Répands ton pain, etc. Le vrai sens de ce verset parait être : Jette ton pain dans l’eau qui passe, comme si tu n’espérais pas de le revoir ; c’est-à-dire fais du bien même aux ingrats ou aux malheureux, de qui tu n’as rien à attendre, parce que, plus tard, tu en recevras la récompense. Cette interprétation semble être autorisée par un passage de l’Évangile de saint Luc (XIV, 12-14).

3. Il y sera ; c’est-à-dire il y restera.

9. Qu’heureux soit ; littér. et par hébraïsme, dans le bien, le bonheur soit.

10. Ta chair ; hébraïsme, pour ton corps, ta personne, toi.

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Qo 12

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CHAPITRE XII

Ne pas attendre la vieillesse pour servir le Seigneur. Énigme de la vieillesse. Vanité des choses du monde. Craindre Dieu et observer ses commandements.

1 Meménto Creatóris tui in diébus juventútis tuæ,

1. Souviens-toi de ton Créateur dans les jours de ta jeunesse

ántequam véniat tempus afflictiónis,

avant que vienne le temps de l’affliction,

et appropínquent anni de quibus dicas :

et qu’approchent les années dont tu diras :

Non mihi placent ;

Elles ne me plaisent pas ;

2 ántequam tenebréscat sol, et lumen, et luna, et stellæ,

2. Avant que le soleil s’obscurcisse, ainsi que la lumière, la lune et les étoiles,

et revertántur nubes post plúviam ;

et que retournent les nuées après la pluie :

3 quando commovebúntur custódes domus,

3. Lorsque les gardes de la maison seront ébranlés,

et nutábunt viri fortíssimi,

et que chancèleront les hommes les plus forts ;

et otiósæ erunt moléntes in minúto número,

que celles qui ont accoutumé de moudre seront oisives et en petit nombre,

et tenebréscent vidéntes per forámina ;

et que seront couverts de ténèbres ceux qui regardaient par les trous ;

4 et claudent óstia in platéa,

4. Et qu’on fermera les portes sur la rue,

in humilitáte vocis moléntis,

à la faible voix de celle qui moud ;

et consúrgent ad vocem vólucris,

et qu’on se lèvera à la voix de l’oiseau,

et obsurdéscent omnes fíliæ cárminis :

et que deviendront sourdes toutes les filles du chant.

5 excélsa quoque timébunt, et formidábunt in via.

5. On craindra aussi les lieux élevés, et on s’épouvantera dans la voie.

Florébit amýgdalus, impinguábitur locústa,

L’amandier fleurira, la sauterelle engraissera,

et dissipábitur cappáris,

le câprier se dissipera ;

quóniam ibit homo in domum æternitátis suæ,

parce que l’homme s’en ira dans la maison de son éternité,

et circuíbunt in platéa plangéntes.

et les pleureurs parcourront la place publique.

6 Antequam rumpátur funículus argénteus,

6. Souviens-toi de ton Créateur, avant que le cordon d’argent se rompe,

et recúrrat vitta áurea,

et que la bandelette d’or se retire,

et conterátur hýdria super fontem,

et que la cruche se brise sur la fontaine,

et confringátur rota super cistérnam,

et que la roue se rompe sur la citerne ;

7 et revertátur pulvis in terram suam unde erat,

7. Et que la poussière retourne dans la terre d’où elle était sortie,

et spíritus rédeat ad Deum, qui dedit illum.

et que l’esprit revienne à Dieu qui l’a donné.

8 Vánitas vanitátum, dixit Ecclesiástes,

8. Vanité des vanités, dit l’Ecclésiaste,

et ómnia vánitas.

et tout est vanité.

9 Cumque esset sapientíssimus Ecclesiástes,

9. Et comme l’Ecclésiaste était très sage,

dócuit pópulum, et enarrávit quæ fécerat ;

il enseigna le peuple, et raconta ce qu’il avait fait ;

et investígans compósuit parábolas multas.

et dans ses recherches, il composa un grand nombre de paraboles.

10 Quæsívit verba utília,

10. Il chercha des paroles utiles,

et conscrípsit sermónes rectíssimos ac veritáte plenos.

et écrivit des discours très justes et pleins de vérité.

11 Verba sapiéntium sicut stímuli,

11. Les paroles des sages sont comme des aiguillons,

et quasi clavi in altum defíxi,

comme des clous profondément enfoncés, lesquelles,

quæ per magistrórum consílium data sunt a pastóre uno.

avec le conseil des maitres, ont été données par un seul pasteur.

12 His ámplius, fili mi, ne requíras.

12. Ne recherche rien de plus, mon fils.

Faciéndi plures libros nullus est finis ;

Il n’y a point de fin à multiplier les livres :

frequénsque meditátio, carnis afflíctio est.

et une fréquente méditation est l’affliction de la chair.

13 Finem loquéndi páriter omnes audiámus.

13. Écoutons tous pareillement la fin de ce discours. Crains Dieu,

Deum time, et mandáta ejus obsérva :

et observe ses commandements ;

hoc est enim omnis homo,

car c’est là tout l’homme ;

14 et cuncta quæ fiunt addúcet Deus in judícium

14. Quant à toutes les choses qui se font, Dieu les appellera en jugement,

pro omni erráto, sive bonum, sive malum illud sit.

pour tout ce qui aura été commis par erreur, que ce soit bien ou mal.

~

CHAP. XII.

 

1. Avant que vienne, etc. Cette phrase et les suivantes, jusqu’à la fin du vers. 4, sont sous la dépendance de la proposition Souviens-toi de ton Créateur, dont elles forment l’apodose. — Le temps de l’affliction ; c’est-à-dire de la vieillesse.

2. Le soleil, la lumière et les étoiles ; c’est-à-dire l’entendement, la mémoire, le raisonnement ; en un mot, les différentes facultés de l’esprit humain. — Avant que les nuées, etc. ; ces paroles marquent une suite de maux qui se succèdent les uns aux autres.

3. Les gardes de la maison, etc. Le corps de l’homme est comparé ici à une maison, de même que dans Job. IV, 19, et dans saint Paul (II Cor. V. 1). Or, les gardes sont les bras et les mains. — Celles qui, etc. ; signifient les dents qui, chez les vieillards, sont ordinairement en petit nombre, et ne peuvent plus mâcher, ni mordre les aliments, et sont, par conséquent, oisives. — Ceux qui regardaient ; c’est-à-dire les yeux. L’hébreu et les Septante portent celles qui regardaient : ce qui se conçoit d’autant plus aisément que, dans la langue hébraïque, le mot yeux est féminin. — Par les trous ; par les orbites, les cavités du crâne où les yeux sont placés.

4. Et qu’on fermera, etc. Ces portes sont apparemment les lèvres que les vieillards ferment en mangeant, étant obligés de serrer leurs mâchoires et leurs gencives, pour mâcher avec elles, à défaut de leurs dents. — La rue ou la place publique (platéa) désigne vraisemblablement ici le creux de la bouche. — À la faible voix ; littér. et par hébraïsme, à la faiblesse de la voix. — Celle qui moud, peut s’entendre de la bouche elle-même, ou d’une des dents molaires. Compar. verset précédent. — Qu’on se lèvera, etc. Le sommeil des vieillards est court et souvent interrompu ; le moindre chant d’un petit oiseau les réveille. — Les filles du chant, sont proprement les organes de la voix, tels que les poumons, l’épiglotte, les dents, les lèvres, etc., comme aussi les oreilles, qui, dans la vieillesse, n’entendent plus et, par conséquent, sont entièrement insensibles à toute espèce de chant et d’harmonie. L’Écriture nous en offre un exemple dans la personne du vieillard octogénaire Berzellaï (II Reg. XIX, 35). Nous ferons observer, à cette occasion, qu’en hébreu l’expression fils ou fille d’une chose se donne à tout ce qui dépend de cette chose, à tout ce qui lui appartient, à tout ce qui a un rapport avec elle. — * L’image tirée de la faible voix de celle qui moud est très naturelle en Palestine. Le bruit de la meule qui écrase le grain caractérise les lieux habités en Orient, comme le bruit des voitures caractérise les grandes villes de l’Occident. On l’entend encore aujourd’hui quand on passe dans les rues des villes et des villages et près des campements arabes. — Les figures et les métaphores employées dans cette description de la vieillesse peuvent nous paraitre bien recherchées, mais elles sont tout à fait dans le gout des Orientaux. À la fin d’un manuscrit syriaque de la Sainte Écriture, le copiste a écrit cette prière : « Daigne, Seigneur, ne pas nous priver de la récompense des cinq sœurs jumelles qui se sont fatiguées à travailler, et des autres sœurs qui leur ont prêté le secours du regard pour semer, avec la vertu de l’Esprit Saint et les ailes d’un oiseau, leur semence dans un champ paisible. » Les cinq sœurs jumelles sont les cinq doigts de la main qui a écrit ; les deux autres sœurs jumelles sont les deux yeux qui ont lu le manuscrit copié ; les ailes de l’oiseau ont fourni les plumes pour écrire, le champ est le papier ou le parchemin et la semence, ce sont les pensées.

5. On craindra aussi, etc. Les vieillards craindront de monter, parce que leurs jambes ne sont plus flexibles, ni leur poitrine et leur respiration libres et dégagées ; et dans le chemin même, ils marcheront avec peine, et toujours dans l’appréhension de trébucher, de rencontrer un sentier raboteux et inégal. — L’amandier fleurira ; c’est-à-dire que les cheveux des vieillards paraitront comme la fleur de l’amandier, qui fleurit blanc. — La sauterelle engraissera ; c’est-à-dire, comme porte l’hébreu, deviendra lourde et pesante ; en sorte qu’elle ne pourra plus ni voler, ni sauter ; autre image de l’homme parvenu à la vieillesse. — Le câprier se dissipera. Cet arbrisseau, s’entrouvrant, produit une fleur blanche qui tombe bientôt, et qui découvre une espèce de gland oblong. Or, cette fleur représente assez naturellement les cheveux blancs qui tombent de la tête des vieillards, et qui la leur laissent toute pelée et toute chauve. — La maison de son éternité ; c’est-à-dire le tombeau, où il demeurera jusqu’à la fin du monde.

6. Souviens-toi de ton Créateur. Ces mots du 1er verset sont évidemment sous-entendus ; sans eux, le sens des versets 6 et 7 resterait suspendu et serait incomplet, — Le cordon d’argent et la bandelette d’or figurent probablement les liens qui attachent à la vie. — La cruche qui se brise sur la fontaine peut signifier le cœur qui se brise à la source de la vie, et la roue qui se rompt sur la citerne, les poumons qui n’aspirent plus l’air.

7. Ce verset suffit pour venger l’auteur de l’Ecclésiaste du reproche de matérialisme ; il est impossible de s’exprimer d’une manière plus claire sur le dogme de la survivance de l’âme au corps.

8. * L’épilogue XII, 8-14, contient la solution du problème énoncé dans le prologue. Tous les efforts de l’homme pour obtenir la félicité complète sur la terre sont vains, XII, 8 ; l’expérience de Salomon, le plus sage des hommes, qui a essayé de tout, en est la preuve, XII, 9-10. Les livres sacrés, qui nous apprennent la vraie sagesse, conduisent à la vraie félicité, XII, 11-12 : ils nous apprennent qu’il y a un juge équitable qui, au grand jour du jugement, nous rendra selon nos œuvres. La règle de la vie, c’est donc de le craindre et de garder ses commandements, c’est-à-dire de pratiquer fidèlement la religion, XII, 13-14. C’est par conséquent Dieu, la pensée de Dieu, qui résout le problème de la destinée de l’âme que s’est posé l’Ecclésiaste. Si Dieu n’intervient pas personnellement dans ce livre, comme dans celui de Job, avec lequel il a tant de ressemblance par le sujet, c’est lui du moins qui donne la solution comme dans Job. Dieu est toujours présent à Salomon ; il ne le nomme pas moins de 37 fois dans douze chapitres ; c’est bien le crains Dieu qui est le devoir de l’homme, V, 6 ; XII, 13, d’où dépend sa félicité, VIII, 12, et son sort définitif, VII, 18 (Vulg., 19) ; XI, 9 ; XII, 14. Telle est la pensée dominante de l’Ecclésiaste et l’explication du livre.

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